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Werner Herzog en 3D

On peut classer les (grands) cinéastes en deux catégories, les hyperactifs (Spielberg, Scorsese) et ceux qui prennent leurs temps (Paul Thomas Anderson, Terrence Malick). Werner Herzog fait partie de la première catégorie, voire même des hyper hyperactifs puisque c'est plus d'une dizaine de film en moins de dix ans mais tous n'ont pas connu le privilège d'une exploitation en salle. Le film qui nous intéresse aujourd'hui a été réalisé en 2010 (depuis Herzog a signé un film en 2011), sorti sur nos écrans le 31 aout 2011 et à fait le bonheur des cinéphiles (non claustrophobes).

La grotte des rêves perdus se présente comme un documentaire mais dépasse allégrement ce statut par une mise en scène simple, dénué d'ornementation inutile, rehaussée par une 3D permettant une immersion totale aux confins de nos origines en tant qu'espèce, mais aussi de s'interroger sur l'origine de la pensée humaine. Un film incroyable qui confirme après Bad Lieutenant, Escale à la Nouvelle Orléans la grande forme du cinéaste d'origine allemande.

Et Metropolitan ne s'y trompe pas en nous "offrant" le 1 mars prochain une édition combo blu-ray 3D et dvd collector de qualité en édition limitée.


C’est une grotte immense, protégée du monde depuis 20 000 ans parce que le plafond de son entrée s’est effondré. C’est un sanctuaire incrusté de cristaux et rempli de restes pétrifiés de mammifères géants de la période glaciaire. Pourtant, ce n’est pas le seul trésor que ce lieu unique au monde avait à nous offrir…
En 1994, au sud de la France, les scientifiques qui ont découvert la grotte sont tombés, ébahis, face à des centaines de peintures rupestres, des œuvres d’art spectaculaires réalisées il y a plus de 30 000 ans – presque deux fois plus vieilles que les peintures rupestres les plus anciennes découvertes jusqu’alors. Ces dessins, ces œuvres, ces témoignages exceptionnels ont été créés à l’époque où les hommes de Neandertal parcouraient encore la terre, en un temps où les ours des cavernes, les mammouths et les lions étaient les espèces dominantes sur notre continent. Depuis, seules quelques très rares personnes ont été autorisées à pénétrer dans la grotte, et ses chefs-d’œuvre sont restés à l’abri des regards – jusqu’à ce que Werner Herzog obtienne l’autorisation d’y réaliser un documentaire d’exception. Avec ses caméras 3D, Herzog a capté toute la beauté de ces merveilles dans l’un des sites les plus grandioses qui soit. Dans un saisissant voyage visuel, Herzog nous entraîne à à la rencontre de nos très lointains ancêtres, à la découverte de la naissance de l’art, de la symbolique puissante des lieux et des étranges personnes qui vivent aujourd’hui dans les environs.

En supplément, un livret de 36 pages, un documentaire sur le film et le court Ode to the Dawn of Man (2011 - 27 mn), plus les bandes-annonces habituelles.

Si vous avez des doutes quant à la continuité dans l’œuvre de Werner Herzog, nous vous proposons un extrait de la critique des Cahiers du Cinéma signée Jean-Sébastien Chauvin.
Au fond, le film suit un mouvement identique à l'ensemble du cinéma d'Herzog, qui en cherchant l'humain, une vérité de l'être, a souvent trouvé le mutant, l’extraterrestre, de Kaspar Hauser au flic de Bad Lieutenant, Escale à la nouvelle- Orléans, en passant par Aguirre. Pas besoin de quitter la Terre. Les mondes étranges sont à notre portée, à côté d'un chemin de randonnée, cachés sous la montagne, enfouis derrière la forêt. C'est pourquoi les films du cinéaste, et particulièrement ses documentaires, sont généralement bine plus que de simples descriptions d'une réalité. Ce sont des contes, des récits imaginaires, des constructions poétiques qui donnent au réel des allures de chimère (et la musique d'Ernst Reijseger fait décoller La Grotte des rêves perdus du réel pour engendrer un diffus sentiment de sacré). Sous l’œil d'Herzog, les archéologues eux-mêmes deviennent des êtres étranges, forment un peuple troglodyte aux occupations impénétrables ; témoin ce panoramique qui les révèle travaillant silencieusement dans un bureau paysager où ils sont finalement tout aussi énigmatiques que les hommes de l'époque aurignacienne.


Jean-Sébastien Chauvin in Cahiers du Cinéma #670 - p30

Joel et Ethan Coen, principes d'incertitude

Quel est le dernier bon film des frères Coen ? Si à cette question la réponse est partagée, THE END y répondra volontiers, No Country for Old men (2007) mais ce n'est pas l'objet de ce message mais plutôt pour évoquer la sortie du 49ième numéro de la revue Éclipses consacrée aux deux frères responsables de néo-polars aboutis et dérangés ou au films - remake (déjà deux dans leurs filmographies) - réactivant des figures stylistiques du passé. Entre visions passéistes et post-modernismes, il y a sans doute beaucoup à dire sur l’œuvre des cinéastes américains, dont voici la présentation de l'éditeur.


Avec True Grit (2010), Joel et Ethan Coen viennent de réaliser leur meilleur score au box-office américain, après avoir signé deux titres qui comptent parmi les plus réussis de leur carrière. Dès lors, le moment semble particulièrement opportun pour opérer une vue d’ensemble et revenir sur la filmographie prolifique et passionnante des deux frères les plus célèbres du cinéma américain contemporain.
Affichant ouvertement une filiation avec le cinéma de l’âge d’or hollywoodien, leurs films adoptent assez fréquemment un aspect classique. Pour autant, c’est en iconoclastes qu’ils agissent, car au-delà du fait de se conformer à certains modèles génériques (le film noir, la comédie), il y a en permanence chez eux un sens aiguisé de la dérision, de l’exagération et de la satire, qui s’exercent sur la matrice originelle et la fait tendre vers une certaine modernité.
La plupart des films des frères Coen adoptent la structure de la fable, qu’elle possède un arrière-plan mythologique au sens strict du terme comme dans O’Brother (2000) avec L’Odyssée, ou bien qu’elle soit le produit d’un effet permanent de mise en abyme des références multiples (historiques, cinématographiques, etc.) dont l’œuvre est traversée. Mais la finalité de la fable repose sur l’énoncé de la morale finale, ou bien, en l’absence de celle-ci, sur la possibilité de pouvoir au moins la déduire de l’issue du récit. C’est bien cette question qui finit par constamment faire retour lorsque l’on s’intéresse au cinéma des frères Coen : quelle est, au bout du compte, pour ne pas dire « au bout du conte », la morale de leurs films ? C’est à l’examen de cette question, notamment, que s’emploient les différentes contributions de ce 49ème volume de la revue Éclipses.


Sommaire :
(Cliquez sur l'image pour lire le sommaire)



Prix : 12 euro

Sono Sion, Monsieur Chaos

Aussi étrange que cela puisse paraitre, seulement deux films, Suicide Club et Noriko's Dinner Table, de Sono Sion sont disponibles en dvd en France et ce, malgré un noyau de fan de plus en plus large. Étrange car cela fait quelques années que chaque long-métrages du cinéaste nippon fait la joie des festivals de genre comme des plus renommés (dont le dernier festival de Venise avec la présentation remarquée de Himizu ou Cannes pour Guilty of Romance).

Lors de l'édition 2011, de l’Étrange Festival Paris, nous avons pu découvrir les films Guilty of Romance et Cold Fish. Deux morceaux de cinéma extrêmes, dérangeants et intrigants. Deux films qui sont autant de descentes aux enfers dans la vie calme et paisible de gens normaux qui voient leurs vies basculées dans la violence, dans l'absurde à la limite du point de rupture. Toute la force du cinéma de Sono Sion réside dans sa capacité à mélanger les univers sans jamais se laisser dominer par eux.

Et dire que ce n'est que la partie visible en France. Pour découvrir le reste de sa filmographie, il faut (comme trop souvent) se tourner vers l'import afin de pouvoir se rendre compte (si besoin est) que Sono Sion, de notre point de vue (de THE END comme celui que l'on pourrait qualifier d'Occidental) est la plus belle promesse du cinéma nippon. Ce qui est moins évident dans son pays natal. Les longs-métrages aussi divers que Love Exposure, fresque de quatre heure sur le fanatisme religieux, Exte, film d'horreur original et très réussi basé sur un postulat pourtant risible, des cheveux "démoniaques" et les deux films évoqués plus haut qui sont déjà disponibles sur support vidéo. A quand une rétrospective de son œuvre en France ?

Surtout quand on sait que les cinéphiles italiens ont eu la chance et le privilège d'assister en novembre dernier à un hommage à Sono Sion lors du Torino Film Festival (TFF) alors qu'aucun films du metteur en scène est disponible en vidéo. A cette occasion, le blog italien Sonatine, spécialisé dans le cinéma Japonais, a publié en partenariat avec le festival de Turin la première monographie consacrée à Sono Sion.



Le livre fait 159 pages et retrace après une présentation biographique de Sono Sion, tous les films du cinéaste, un par un. On retrouve également un entretien passionnant d'une dizaine de pages sur aussi bien les influences du réalisateur, que son utilisation de la musique ou bien son point de vue sur Fukushima, la société japonaise. Voici quelques extraits de l'ouvrage :
(cliquez sur l'image pour lire le texte)





Oui, le premier frein à l'acquisition de ce livre est sa langue. Mais si vous avez un niveau scolaire en italien (comme votre serviteur ici présent) vous n'avez qu'une envie : vous procurez cette ouvrage à moins qu'un éditeur français (Rouge Profond ? IMHO ? Bazaar & Co ? Le Lézard Noir ?) se décide à nous proposer une publication sur ce cinéaste chaotique.

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Si vous êtes intéressé par l'acquisition de cette ouvrage (environ 20 euro), manifestez-vous auprès de nous afin qu'on rentre en contact avec l'éditeur et ainsi proposer le livre en France. >theendstore@gmail(POINT)com

Swedish Erotica Collection

Avant d’être disponible chez Bach Films (et donc auprès de THE END), les trois fleurons du cinéma érotique suédois que sont La possédée, libres-échanges et Anita étaient disponibles en zone 2 chez nos voisins Britanniques. Dispatché dans deux coffrets distincts, Swedish Erotica Collection 1 & 2, ces éditions avaient l'avantage de proposer à l'époque six films indisponibles en France. Depuis, (Saint) Bach films a remédié à ça en nous proposant 3 films (en version française uniquement) sur les six. C'est-à-dire les trois avec la célèbre Christina Lindberg. Depuis quelques jours une box réunie l'intégralité des films au sein d'un seul coffret.



Vous pouvez donc retrouver dans ce coffret les six films suivants :

The Language Of Love (1969)
More About The Language Of Love (1970)
Exposed (1971) La Possédée
Love Play: That's How We Do It (1972)
Anita, Swedish Nymphet (1973) Anita / Les impures
Wide Open (1974) Libre-échanges

Pour le cinéphile français ce coffret ne présente plus que l'intérêt de proposer trois long-métrages représentatifs du cinéma érotique suédois dont Language of love disponible à l'unité, et ce pour la première fois.



Deux autres films sont vendus à l'unité, Exposed et Anita, deux films disponibles en zone 2 chez Bach Films. Pour le plaisir, voici les visuels des dvd (que nous trouvons particulièrement réussis) :



Pas de bonus, mais à noter qu'il s'agit ici des versions originales sous-titrés en anglais.

Robert Altman, une biographie orale

Lorsqu'on évoque Le Nouvel Hollywood (1969-1981), les premiers noms de films ou de cinéastes qui viennent à l'esprit sont ceux de Coppola, Scorsese, Malick ou De Palma et peut-être Robert Altman (1925-2006). Depuis le 18 janvier dernier, la cinémathèque de Paris rend hommage à celui qui signa peut-être les films les plus revendicatifs et inventifs au sein du système Hollywoodien. On pense à M.A.S.H (palme d'or à Cannes en 1970, John McCabe (1971) ou à son adaptation de Chandler, Le Privé (1973). En marge de cette rétrospective, l'éditeur G3L a publié en novembre 2011, un ouvrage retraçant ce parcours si singulier. Pour en juger par vous-même, voici ce qu'écrit Peter Biskind dans son livre Le Nouvel Hollywood :

Catholique défroqué, Altman avait toujours été un rebelle. Ainé de trois enfants, il vit le jour dans une éminente famille du Kansas, le 20 février 1925. Courtier en assurances, son père avait des penchants pour le jeu, les filles et l'alcool. En dépit de cela, la vie familiale était plutot équilibrée. Engagé volontaire dans l'armée de l'Air à dix-neuf ans, Robert servit en tant que copilote dans un B624 au Japon durant les derniers combats de la Seconde Guerre Mondiale. A son retour, il épousa Lavonne Elmer. Quelques jours avant le mariage, les tourtereaux eurent un grave accident de voiture et c'est les mâchoires fermées que Lavonne murmura tant bien que mal devant le maire le "oui" décisif. "Miraculeusement indemne" : voici en deux mot résumée la vie d'Altman. Le couple s'envola pour Los Angeles, où ils essayèrent de gagner leur vie du mieux qu'ils purent. Bob fit de nombreux petits boulots, tatoueur de chiens par exemple. Sa seule détente était le cinéma. Le Voleur de Bicyclette de Vittorio De Sica et Brève Rencontre de David Lean furent à l'origine de sa vocation. Il commença à écrire quelques scénarios. Mais, foncièrement instable, il ne tarda pas à quitter Lavonne et revint s'installer à Kansas City, où il trouva un boulot dans l'industrie.
Mais il avait attrapé le virus du cinéma à Los Angeles et pour commencer, il avait décidé de vivre à hollywoodienne, ce qui revenait principalement à fréquenter les filles, à jouer et à se saouler. A l'hollywoodienne, bien sûr. Au beau milieu du déjeuner, il quittait la table et allait rejoindre une prostituée dans la rue d'à côté pour une pipe à deux dollars. "Se faire sucer à l'heure du déjeuner, pour lui, c'était tout particulièrement Hollywoodien", se souvient Richard Peabody, son copain de l'époque.
En 1954, [...] il fit alors ses débuts dans le documentaire en tournant un film au budget ridicule, The Delinquants, financé par un petit industriel de la région. Altman décida de monter son film à Los Angeles. L'industriel en question refusant catégoriquement de lui payer son billet d'avion, un beau soir d'aout 1956, il vola les rushes, les mit dans le coffre de la voiture prêtée par la production et démarra, direction Los Angeles, laissant une fois pour toutes derrière lui sa (seconde) femme, ses enfants et toute sa famille.



Robert Altman a fait irruption sur la scène cinématographique en 1970 avec le film M*A*S*H. Il a révolutionné le cinéma américain et en une décennie a réalisé des chefs-d’oeuvre tels que John McCabe, Nous sommes tous des voleurs, Le Privé,Trois Femmes et, bien entendu, Nashville. Puis, après une période de désillusion, il s’est réinventé à travers une série de films audacieux : The Player, Short Cuts et Gosford Park. Juste avant la sortie de son quarantième et dernier film The Last Show, il a reçu un Oscar d’honneur remis par une Académie qui l’avait longtemps ignoré. Sa carrière unique et singulière est racontée à travers les mots de sa famille et de ses amis, des agents, scénaristes, coéquipiers, producteurs et vedettes avec qui il a travaillé. On y retrouve Meryl Streep, Warren Beatty, Julianne Moore, Paul Newman, Martin Scorsese et tant d’autres. Robert Altman – réalisateur visionnaire, fêtard invétéré, homme de famille excentrique et légende hollywoodienne – reprend vie dans cette biographie cinématographique.

Mitchell Zuckoff, professeur de journalisme à l’université de Boston, travaillait avec Robert Altman à ses mémoires peu avant sa mort. Il tisse ici les derniers entretiens où se mêlent histoires et articles de journaux, dressant le tableau d’une vie en tous points extraordinaire.

594 pages - 40 euro

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Divers films de Robert Altman sont disponibles en dvd auprès de THE END (Le privé, Short Cuts, The Player, John McCabe,... plus d'infos par mail à theendstore@gmail(POINT)com

Spielberg en (hors) série

A l’occasion des sorties rapprochées des films Les aventure de Tintin et Cheval de guerre (22 février 2012), ainsi qu'une (grande) rétrospective à la cinémathèque de Paris (du 9 janvier au 3 mars 2012), Mad Movies et Les Inrockuptibles viennent de publier deux hors séries à un mois d'intervalle. THE END vous propose un bilan pour faire votre choix. Commençons tout d'abord par Mad Movies puisqu'il s'agit du premier a avoir été disponible en kiosque.

Sorti en décembre 2011, le Hors-série de Mad Movies fait 132 pages pour un poids de 300 grammes. Spécialisé dans le cinéma de genre et plus particulièrement d'horreur, Mad Movies consacre la majorité de ses pages aux films qui s'inscrivent dans le domaine de la science-fiction et du fantastique. Voici le sommaire


Préface de Joe Dante
Les critiques des films : Duel, Les Dents de la mer, Rencontres du troisième type, E.T., l'extra-terrestre, La Saga Indiana Jones, Jurassic Park + Le Monde perdu, A.I. Intelligence Artificielle, Minority Report, La Guerre des mondes et Les Aventures de Tintin
Les débuts de Spielberg
Spielberg et l'horreur
Spielberg et les E.T.
La TV de Spielberg
Œuvres mineures ? (1941, La Quatrième dimension, Always, Hook)
La Formule Amblin
La Famille Spielberg
La Musique
Vidéographie



Si les autres films (La couleur pourpre, La liste de Schindler ou encore Amistad) sont évoqués au travers d'articles pour témoigner de la boulimie de travail du cinéaste, le cinéphile plus "généraliste" aura un gout d'inachevé... mais la ligne éditoriale de la revue passe avant... et celle-ci est respectée, cela est compréhensible. En contre-partie l'amateur de Spielberg pourra se délecter d'articles aussi bien informatif que proposant des analyses perspicaces et développé de fort belle manière.

Le point fort du HS de Mad Movies est de proposer un ensemble conséquent aux différentes activités parallèle de la carrière de Steven Spielberg, que se soit en tant que producteur (via Amblin puis Dreamworks) qu'à la télévision à travers ses nombreux projets, par toujours récompensés par le succès, loin s'en faut.

Quant aux Inrocks, leur hors-série fait 100 pages pour un poids de 200 grammes. Il suffit de feuilleter la revue pour s’apercevoir de la rareté du texte au profit de photographies, mais c'est une impression qui s'évacue rapidement dès la lecture, car ce numéro hors-série de l'hebdomadaire culturel réserve quelque bonne surprise. Avant de lister les points forts, regardons le sommaire :


I. Une Vie
Un jeu d'enfant Naissance d'un cinéaste
Une génération Spielberg et le Nouvel Hollywood
La construction d'un empire Plongée dans le Système Spielberg
L'extension d'un empire Spielberg et la télévision
Le maitre et ses disciples Les Héritiers de Spielberg

II. Une œuvre
Critique de l'intégralité des longs métrages de Duel (1971) à Cheval de guerre (2011)
Persistance rétinienne Onze motifs récurrents dans l’œuvre de Spielberg

III. Des gens
Master Class Steven Spielberg s'entretient avec James Cameron et J.J Abrams
Portrait de groupe La galaxie Spielberg
Tout Spielberg Filmographie, rétroxpective à la Cinémathèque français


Outre le fait que les Inrocks propose des critiques sur l'ensemble de la filmographie de Steven Spielberg, le cinéphile appréciera plus particulièrement deux articles passionnants. Le premier s'intitule "Persistance rétinienne" et s’intéresse à tous les motifs visuels récurrents dans l’œuvre de Spielberg. On retrouve donc le chromo familial, le halo, l’œil, la mâchoire, le parc d'attraction, les ébahis, l'ami imaginaire, le caca, le cercle, apnées et enfin les avions. Pas d'analyse mais juste la preuve par l'image de la répétition de signes, telle une marque de fabrique du style Spielberg. L'autre document important de ce hors-série est la retranscription (divers extraits) de la Master Class donné par Steven Spielberg en compagnie de James Cameron et J.J Abrams à la Director's Guild of America, à Los Angeles. Une discussion qui revient sur différents thèmes traités à l'intérieur du hors-série mais qui développe certains aspects ou entêtement (réalisé La Liste de Schindler en noir et blan et non en couleur comme le souhaité le studio) qui affirme Steven Spielberg comme un réalisateur de conviction et non le yes man à la solde des studios comme on l'a trop souvent présenté durant la fin des années 80.

Pour le reste, on peut constater des similitudes (obligatoires ? même le pull à rayure de Spielberg est identique) entre les deux revues qui reviennent l'une comme l'autre sur les aspects de la constellation Spielberg. Après c'est une question de sensibilité vis-à-vis de la revue mais sachez que les chroniques des films des Inrocks sont peut-être plus courtes mais font tout autant réfléchir et surtout donne une irrésistible envie de se replonger dans le monde de Steven Spielberg.

Au final, Les Inrockuptibles permettent d'avoir une vue d'ensemble de la carrière du papa d'E.T. tandis que Mad Movies dévoile l'inconscient d'un cinéaste qui marquera le septième art comme Kubrick ou Hitchcock l'ont fait dans leurs temps.

13 assassins de Miike en dvd / blu-ray

Tourné un an avant Hari Kiri, son dernier film a être sorti dans les salles française en novembre dernier, 13 assassins pourrait être la confirmation que le style de Miike a perdu en excentricité. Mais, mieux vaut voir ces deux films de sabre comme une parenthèse plus qu'un changement radical. En effet, le réalisateur nippon semble comme toujours alterner les projets "adultes" comme les projets plus légers (en 2011, outre son remake d'Hara-Kiri, Miike a signé l'adaptation du manga Nintama Rantarô de Soubee Amako, une histoire d'enfant ninja). 13 assassins à l'instar d'Hara-Kiri, mort d'un samouraï est le remake d'un film d'Eichi Kudo de 1963 (disponible en dvd dans la collection Les Introuvables Wild Side sous le titre Les Treize Tueurs).


C'est sous la bannière de Metropolitan Filmexport que verra le jour l'édition dvd et blu-ray. A noter que la sortie blu-ray se fera sous le label HK Vidéo en édition limité, comprenant en bonus exclusif un livret de 12 pages. Pour le moment, nous n'avons que le visuel du dvd à vous faire partager.


A l’époque des Shoguns, le puissant seigneur Naritsugu menace la paix du Japon en provoquant des guerres incessantes. Déterminé à stopper sa folie meurtrière, un groupe de samouraïs renégats prépare en secret sa chute. Inférieurs en nombre, les 13 guerriers vont devoir affronter la redoutable armée de Naritsugu lors d’une ultime bataille, monumentale et sanglante.

Supplément :
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Entretien avec le réalisateur
Scènes coupées
Bandes-annonces
Livret exclusif de 12 pages (pour l'édition blu-ray)



Sortie : 20 mars 2012

Eyes Wide Open #1

Comme beaucoup de cinéphiles, THE END cherche les derniers projets cinématographiques qui feront le "ramdam" dans les prochaines semaines parmi la communauté des passionnés de cinéma... enfin du moins on l'espère. Alors voici une sélection de trois films projetés dans divers festivals qui ne sont pas encore annoncés en France mais on croise les doigts, n'hésitez pas à nous laisser vos avis sur notre page Facebook.

Débutons notre premier "eyes wide open" avec ce long métrage australien présenté à Venise dans la section "Orizzonti".


Après son documentaire Bastardy, Amiel Courtin Wilson signe son premier film de fiction racontant l'histoire des retrouvailles entre un ex prisonnier et sa femme. Grandement inspiré des souvenirs de l'acteur principal (Daniel P. Jones) et de son épouse (qui joue son propre rôle dans le long-métrage), la bande annonce de Hail laisse présagé un film à la beauté plastique digne de Terrence Malick ou du récent Take Shelter de Jeff Nichols.



Direction la Malaisie avec un film de kick boxing matinée au film de gangster


Près de la frontière Thaïlandaise, le parcours de trois frères va se transformer en histoire criminelle. Réalisateur de court métrage dans les années 80, c'est seulement au début des années 90 que Dain Said se fait remarquer avec son "documenteur" ou "mockumentary" Surabaya Johnny. 17 ans plus tard, le réalisateur retrouve les écrans de cinéma avec Dunkun, un film que l'on annonce comme un croisement entre la magie noire et le polar. Enfin Bunohan (que l'on peut traduire par meurtre) est sans aucun doute son ticket pour la reconnaissance en occident.



Enfin, finissons en légèreté, avec une comédie nordique sur un sport peu médiatisé et peu connu par chez nous, le... curling.


Sortie le 23 septembre 2011, Kong Curling (ou King Curlin pour son titre international) est le premier film écrit et réalisé par Ole Endresen sur le retour d'un ex champion de ce sport au sein de son équipe, les Trashy Gentlemen, afin de réunir de l'argent pour sauver leurs anciens entraîneur.

Les premiers pas de James Dean

Si pour beaucoup, James Dean, c'est trois films, (A l'est d'Eden ; La Fureur de Vivre et Géant), Bach Film a décidé de déterrer des entrailles de la télévision américaine les premières apparitions comme les "premiers" rôle de l’icône.


Présentation de l'éditeur :
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DISQUE 1
HILL NUMBER ONE
Pendant la Guerre de Corée, à la veille d’un nouveau combat, un groupe de soldats est abordé par un prêtre qui souhaite les sensibiliser à la religion catholique…
Bonus : Présentation du film par Stéphane Bourgoin.

I AM A FOOL
Un adolescent rebelle tombe amoureux d’une jeune fille de bonne famille.
Bonus : Présentation du film par Stéphane Bourgoin.

THE BELLS OF COCKAIGNE
Un jeune père sans le sous tente de subvenir aux besoin de son enfant malade.
Bonus : Présentation du film par Stéphane Bourgoin.

DISQUE 2
THE JAMES DEAN STORY
Le tout premier documentaire après la mort de James Dean réalisé par Robert Altman.
Bonus : Présentation du film par Stéphane Bourgoin.

THE EVIL WITHIN
La femme d’un savant jette son dévolu sur l’assistant de celui-ci, interprété par James Dean.
Bonus : Présentation du film par Stéphane Bourgoin.

DISQUE 3
CONDAMNÉ À MORT (SENTENCE OF DEATH)
Une course contre la montre s’engage pour sauver un homme accusé d’un crime qu’il n’a pas commis.
Bonus : Présentation du film par Stéphane Bourgoin
- A propos de Thomas Walsh par François Guérif
- Entretien avec André Grasset sur la restauration - Film avec publicités d’origine, dans les conditions du direct.

L'ensemble du coffret a une durée de 269 minutes dont voici la répartition :

Hill Number One (série : Family Theatre - 1951) : 60 minutes
I am a fool (série : General Electric Theater - 1953) : 30 minutes
The Bells of Cockaine (série : Armstrong Circle Theatre) : 25 minutes
The James Dean Story : 82 minutes
The Evil within (série : Tales of Tomorrow - 1951) : 25 minutes
Sentence of death (série : Studio One - 1953) : 60 minutes

Enfin sachez que le documentaire de Robert Altman a été édité par TF1 vidéo en 2004, couplé avec un autre documentaire "James Dean, Gloire et solitude d’un géant" de 52 minutes. Ce coffret est toujours disponible à la vente. Mais l'intérêt du coffret Bach est de proposer pour 25 euro, des archives rares, jamais vu (en dvd) en France qui sont donc a valeur plus historique que qualitative, mais peut-être nous nous trompons, du moins encore un bel effort de Bach pour creuser toujours plus loin l'autre histoire du cinéma.

Le Conformiste en blu-ray / dvd

Si aujourd'hui le cinéma de Bernardo Bertolucci n'a plus grand intérêt à nos yeux, le cinéaste italien a jadis signé des films bouleversants et aux visuels incroyables. C'était le temps des débuts (Prima della rivoluzione, prochainement disponible en dvd auprès de THE END), des années 60 (Partner, 1968, avec Pierre Clementi et Tina Aumont, à quand une réédition en dvd / blu-ray ?) et surtout la décennie des années 70 qui va le consacrer internationalement avec Le dernier Tango à Paris (1972), 1900 (1976) et surtout Le Conformiste (1970).


Les interrogations et les actes d'un jeune fasciste en 1935 alors qu'il est envoyé en mission en France pour supprimer un professeur de philosophie qui lutte au sein des activités antifascistes.

Restauré par la Cinémathèque de Bologne, Le Conformiste, adaptation d'un ouvrage d'Alberto Moravia, se voit offrir une seconde jeunesse chez l'éditeur transalpin Raro Video, par l'intermédiaire d'une édition événement en dvd et en blu-ray :


En bonus, on retrouve une bande-annonce, un documentaire intitulé "All'ombra del conformista" que l'on peut traduire par "A l'ombre du Conformiste" de Adriano Aprà, une interview de Bernardo Bertolucci (57 minutes) et un livret en italien et en anglais.

Cette restauration fait des émules puisque l'éditeur Arrow sortira à la fin du mois de février son édition dont voici les détails :


- Audio commentary by Italian cinema expert David Forgacs
- Feature length documentary “Bernardo Bertolucci: Reflections on Cinema” on Bertolucci’s career with on-set archive material and interviews directed by Sandro Lai (Blu-ray only)
- A comprehensive booklet featuring brand new writing on the film by critic Michael Atkinson, a re-printed interview with Bernardo Bertolucci from 1971 and Bertolucci’s thoughts on filmmaking, illustrated with original stills
- High Definition Blu-ray and Standard Definition DVD presentation of the film
- HD restoration supervised by Director of Photography Vittorio Storaro in the original 1.66:1 aspect ratio
- Original Mono 2.0 audio
- Italian language with optional English subtitles.

Si de prime à bord, Arrow propose (une nouvelle fois) une interactivité riche et conséquente et qui plus est sous la forme d'un combo blu-ray / dvd, le francophone ne pourra que regretter l’absence d'un quelconque doublage en Français (n'évoquons même pas un sous-titrage, l'éditeur anglais ne propose jamais de sous-titrage dans la langue de Molière, et ce, surement pour des questions de droits). En attendant une hypothétique édition française (Wild Side ? Carlotta ? ces derniers on déjà travaillé avec la Cinémathèque de Bologne pour le coffret consacré à Lionel Rogosin. Peut-être un élement de réponse...) l'édition italienne reste la seule possibilité pour revoir le film... en français. Et oui, le dvd comme le blu-ray propose une piste son française*, quoi de plus normal pour une coproduction entre la France et l'Italie (et l'Allemagne)



en vente sur theendstore.com

ou en envoyant un email à theendstore@gmail(POINT)com ou à contact@theendstore(POINT)com
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*nous devons recevoir dans les prochains jours, nos exemplaires destinés à la vente, nous vous tiendrons informés de la présence d'une piste française sur l'intégralité du long métrage.
MAJ : nous confirmons la présence d'une version française sur le blu-ray et le dvd

Fassbinder restauré, Fassbinder réédité

Hier, nous évoquions la fidélité de Capricci envers Albert Serra. Aujourd'hui, nous allons évoquer celle qui unit Carlotta à Rainer Werner Fassbinder (1945-1982). En effet, depuis 2004, Carlotta a contribué à (re)faire connaitre l’œuvre du cinéaste allemand à travers des ressorties salles grâce à des copies restaurées et à une collection de dvd aux conditions plus qu'exceptionnelles. Proposant bien souvent des suppléments passionnants, Carlotta a su petit à petit offrir au cinéphile des pépites jusqu'à ce jour invisible. On pense à la saga Berlin Alexanderplatz, Je veux seulement que vous m'aimiez ou encore le rare, Le Monde sur le fil. Avec 43 films à son actif, Fassbinder n'a pas fini de nous ravir.

Les deux nouveaux Fassbinder a être édité par Carlotta ne sont pas à proprement parler des "nouveautés". Whity (1970) et Lili Marleen (1980), les films en questions, étaient jadis disponibles au sein d'un coffret comprenant également Pionniers à Ingolstadt (1970). L'intérêt de ce coffret est toujours d'actualité puisque les éditions Carlotta vont ne comporter, selon nos informations, aucun bonus, à l'exception de bandes-annonces.


Un étonnant western marxiste, une œuvre unique et rare.
Surprenant western aux allures de drame social, Whity est un cas unique dans la carrière féconde de R.W. Fassbinder. Si le cinéaste rend hommage aux modèles du genre en citant Frtiz Lang (L'Ange des maudits) ou Erich Von Strohein (Les Rapaces), il offre une version pervertie du mythe américain. Bouc émissaire de ses maitres dégénérés, le héros noir de Fassbinder stimule les perversions sadomasochistes de la classe dominante pour mieux inverser les rapports de force. Porté par le charme d'Hanna Schygulla (Lili Marleen) et l'insolence de sa mise en scène, Whity est une oeuvre rare !.


Un superbe portrait de femme
Inspiré d'un hymne mythique de la Seconde guerre mondiale, rendu mondialement célèbre par Marlène Dietrich, Lili Marleen raconte le destin tragique d'une femme dans l'Allemagne nazie. Avec cette fresque monumentale, d'une ampleur rare dans l’œuvre de Fassbinder, le cinéaste livre son film le plus mélodramatique et nous raconte une histoire d'amour impossible. Égérie du réalisateur, Hanna Schygulla (Le Mariage de Maria Braun) trouve là son plus grand rôle. Vision pessimiste de la cruauté des hommes, Lili marleen est une charge poignante contre les rouages de la machine politique et l'une des œuvres majeures de Fassbinder.

Présenté en version originale sous-titré français et en version française, incluant donc les bandes-annonces, ces éditions seront vierges de toutes analyses de journaliste ou d'historien de cinéma. Certes les films n'auront jamais été aussi beau mais par rapport au coffret (toujours disponible auprès de THE END) point de présentation de Noël Simsolo et point de documentaires (Remember Fassbinder : les romanciers ; les cinéastes ; Les découvreurs). Si le premier bonus, c'est le cinéma, pour paraphraser le slogan de la collection dvd des Cahiers du Cinéma / Why Not, il ne fait aucun doute que les amoureux de Fassbinder seront quelque peu désapointer face à ce manque de compléments. Mais attendons la sortie des dvd en avril 2012, peut-être auront nous une surprise ?

Capricci : Albert Serra en dvd

A force de nous abreuver de publications plus intéressantes les unes que les autres, on oublie que le métier premier de Capricci est la production d’œuvre cinématographique. Après avoir distribué en salle puis en dvd, le premier long métrage d'Albert Serra,Honor de cavalleria (2006), Capricci a directement aidé à la production de son second long métrage, Le chant des oiseaux (2009). Sorti en salle en janvier 2009 et auréolé de nombreux prix à travers le monde, Capricci réitère son engagement envers le cinéaste ibérique avec la sortie en dvd (mars/avril 2012) de ce second film, ainsi que du récent El senyor ha fet en mi meravelles traduit littéralement Le Seigneur a fait pour moi des merveilles.


DVD 1 : Le chant des oiseaux (2008)
Les Rois Mages sont en route à la recherche du Sauveur. Ils traversent, un peu au hasard, des déserts de glace, puis de sable. Ils vivent au gré des saisons, en harmonie avec la nature, se nourrissant simplement et dormant à la belle étoile.

"Tourné en Islande, en France et dans les îles Canaries, Le Chant des oiseaux porte l'adoration des mages à l'ère d'Internet, dans un désert mondialisé. C'est un refrain désormais connu, entendu partout, de Shanghaï à Hollywood. Mais les mages ne tirent ici ni puissance ni ivresse de ces bonds intercontinentaux. Au contraire, ils sont lourds, raides ou enflés en toutes circonstances, marchent le dos voutés ou tanguent comme des pingouins, et lorsque se présente la chance d'une séquence aquatique, leur corpulence leur permet tout juste d'agiter l'extrémité de leur membres et de flotter à la surface comme des bouées ou des toons. On les voit parcourir le globe, ils sont taillés pour la sédentarité. Leur langue, leur élocution, leurs traits et leur port sont ceux de la Catalogne profonde. Allongés côté à cote, le simple fait de changer de position paraît nécessiter une force titanesque. évoquant les capes de Star Wars, leurs habits font aussi bien songer à des peignoirs"
Antoine Thirion p.10-11 in Cahiers du Cinéma #641 - janvier 2009

Aussi surprenant que contemplatif, cette "comédie" en déstabilisera plus d'un face à ce film d'où émane par la beauté des images une certaine étrangeté. Son premier long métrage était déjà une relecture des aventures de Don Quichotte et Sancho Pança, ici, point de blasphème, juste une libre interprétation d'un récit.



Le second film, projeté l'été dernier au Festival de Locarno (Suisse), est une commande du musée d'art contemporain de la ville de Barcelone (MACBA) entre Serra et Lisandro Alonso. Le principe était que chacun des cinéastes envoient à l'autre une "correspondance" vidéo. Alonso a réalisé un court métrage d'une trentaine de minutes, Carta para Serra et Albert Serra lui a répondu par un long-métrage de 146 minutes.

DVD 2 : Le Seigneur a fait pour moi des merveilles (2011)
Albert Serra, ses proches collaborateurs et ses acteurs, repèrent des paysages, visitent, débattent, attendent. Ils arpentent La Mancha.

Si nous ne savons que très peu de chose sur ce film, qui se présente comme une comédie, l'adjonction de ce second film est le supplément inattendu qui suffit à réjouir le cinéphile. Pour patienter jusqu'à la sortie du dvd, retour sur Le chant des oiseaux avec un extrait de la note d'intention du réalisateur publiée dans les Cahiers du Cinéma lors de la sortie du film en salle.

La quête des Rois mages...
Qui ne connait pas cette histoire, à la base de la tradition chrétienne ? Trois rois partis pour adorer le Seigneur nouveau-né, guidés simplement par une étoile, chargés des plus somptueux présents... Quel paradoxe, pourtant, quand on songe que leur épopée tient en deux paragraphes dans La Bible. Dans quelle mesure alors ce que nous en savons, ou croyons en savoir, ne relève-t-il pas davantage de notre imagination que du Texte ?
Pour le réalisateur que je suis, tout est donc possible? Impensable trahison de l'Idée ; évident foisonnement d'idées. Le Rois mages en proie aux rigueurs climatiques - la neige, le froid ; la lumière irradiant le sable du désert libyen. Les Rois mages face à des signes difficiles à interpréter : un buisson en feu, un éclair sur un lac. Les Rois mages évoquant des sujets plus matériels : d'où proviennent leurs maux de ventre ? Choisissent-ils avec circonspection les herbes dont ils se nourrissent simplement ? Rois mais hommes avant tout, forcés de vivre en harmonie avec la Nature.
Il n'est pourtant, et naturellement pas question de faire un film verbeux, sensationnel. Il ne s'agit pas de narrer le mythe constitutif mais plutôt de rendre compte de son atmosphère, de sa dimension poétique. Comme dans mon précédent film, Honor de cavalleria, c'est la recherche d'une forme singulière qui m'intéresse.
Je souhaite réaliser Le Chant des oiseaux dans le même esprit, poussant plus loin encore la philosophie de tournage qui a présidé à la production de Honor de cavalleria.
Au niveau technique, d'abord. Le tournage d'Honor de cavalleria m'a convaincu du potentiel qu'offre aujourd'hui le numérique. Tout ce qui est joué par les comédiens est tourné, sans souci de changement d'objectifs, de lumière artificielle, de remplacement de chargeur, de répétitions. Cela est primordial pour travailler avec des acteurs non professionnels. Les aspects techniques ne seront pas négligés pour autant dans ce nouveau projet. Au contraire. Ils seront confiés aux mêmes professionnels (directeurs de la photographie, directeur artistique et technique du son) ainsi qu'au même laboratoire que pour Honor de cavalleria. Nous chercherons à atteindre une image encore plus surprenante, tout en gardant une certaine austérité visuelle.
Je souhaite néanmoins donner au Chant des oiseaux un ton plus empreint de comédie que pour Honor de cavalleria, film sévère, très conceptuel. Le chant des oiseaux offrira, je l'espère, davantage de place à l'inconnu puisque la Bible propose un récit très sommaire de l'épopée des Rois mages. La mise en scène pourra être plus extravagante dans ce projet que dans le précédent - même s'il est difficile de rendre compatibles ces deux tons si divergents, le mythique et l'humoristique. C'est aussi en cela que l'on pourra juger de la réussite du projet.


Albert Serra - p.13

Prix : 25 euro

Mondo Hollywood : un mondo culte !

Disponible en dvd depuis 2008 chez l'excellent éditeur Chalet Pointu, Mondo Hollywood (1967) est un mondo devenu culte par son interdiction (temporaire) en France comme en Californie. Son côté sulfureux vient également des apparitions de Bobby Beausoleil, bien connu des admirateurs de Kenneth Anger ou de Charles Manson et de tous un tas de freaks comme de vedette de cinéma, et ce, pendant plus de 120 minutes psychédéliques. L'évocation de ce dvd, nous permet également de rappeler l'existence de l'(excellent) ouvrage de Sébastien Gayraud et Maxime Lachaud, Mondo Movies et films cannibales, Reflets dans un œil mort, indispensable pour quiconque s’intéresse à ce phénomène aujourd'hui disparu (quoique, on retrouve dans certains shows de télé-réalité ou certaines émissions des réminiscences des Mondo qui jadis faisaient scandales, là, où aujourd'hui cela est anecdotique) et sur l'évolution des mœurs à travers le monde.


Tourné entre 1965 et 1967, ce documentaire underground est un film culte sur le Hollywood des années 60 : acteurs, sportifs, LSD gourous, hippies, musiciens, danseuses, travestis...Considéré comme une "prophétie bizarre" par la critique, un film "pro-communiste" pour la CIA, "donnant une image trop flatteuse du capitalisme, trop de voitures et de piscines" pour les communistes, interdit en 1968 en France pour apologie de perversités, incluant la drogue et l'homosexualité, ce film est un témoignage dune société en pleine mutation morale. Avec des apparitions de Frank Zappa, Sean Connery, Brigitte Bardot, Alfred Hitchcock, Ronald Reagan... mais aussi Bobby Beausoleil, membre de la "Manson family" (aujourd'hui en prison pour meurtre) et Jay Sebring coiffeur des stars, victime de Charles Manson.

Supplément : interview de Robert Carl Cohen (80mn)

En bonus, THE END vous propose (dans un but informatif et pour la promotion de l'ouvrage) la chronique de Sébastien Gayraud et Maxime Lachaud extraite de Mondo Movies et films de Cannibales.


Mondo Hollywood (1967) de Robert Carl Cohen est un (autre) objet cinématographique non identifié mais dont le montage survitaminé et le psychédélisme jubilatoire en font un témoignage passionnant et unique sur les États-Unis des années 60, même si son action se déroule exclusivement à Hollywood.

Robert Carl Cohen commence dans le documentaire à la fin des années cinquante et après avoir filmé la Chine, l'Allemagne ou Cuba, il se décide avec ce projet d'enfin retourner vers ses origines et d'aller à la recherche des personnalités les plus excentriques du lieu où il a grandi. Il part d'un principe simple : il y mettrait tous les êtres les plus hors normes et les plus insolites qu'il rencontrera et leur fera narrer leurs propres scènes, dans un principe de volontariat et de liberté d'expression. Personne ne sera payé, aucune ligne de dialogue n'est écrite, et Cohen, lui, se charge de monter tout ce qu'il récoltera sur bobines.

Muni d'une camera 24 heures sur 24, il se fait le témoin de ce Hollywood de la fin des années soixante, excentrique, tourné vers la culture surf et les acides. Le tournage commence en septembre 1965 et dure jusqu'en mai de l'année 1967 mais, comme il le stipule lui-même dans un entretien avec Don Wrege, son attitude diffère de celle de Jacopetti lorsqu'il fit Mondo Cane : "J'ai fait de mon mieux pour capturer l'esprit de la ville à cette époque, un esprit qui n'existe plus. Hollywood est très différente aujourd'hui. Je n'ai pas essayé d'aller chercher ce que vous appelleriez "l'obscène". Mondo Cane fut le premier à utiliser le spectacle Mondo aux Etats-Unis.[...] J'ai donc essayé de montrer le monde Hollywoodien, alors que dans Mondo Cane , ils recherchaient le sensationnel. Je n'essayais pas de rendre Hollywood sensationnel, elle l'était déjà assez !".

Il n'a pas besoin d'aller chercher l'insolite, l'insolite est partout à Hollywood. De plus, en se faisant passer pour un journaliste de la chaine Monte Carlo TV (qui n'a d'ailleurs jamais existé), il a pu avoir accès à des séances exceptionnelles et on trouve dans son film de nombreuses personnalités : d'Alfred Hitchcock à la Reine Elizabeth, de Frank Sinatra à Brigitte Bardot, de Dean Martin à Robert Mitchum, de Telly Savalas au couple Elizabeth Taylor/Richard Burton, de Michael Caine à Anthony Quinn, de Jayne Mansfield à Charlton Heston, de Steve McQueen à Rock Hudson, etc. Plusieurs séquences font aujourd'hui partie de l'histoire comme la conférence de presse de Ronald Reagan, sans parler de la présence de Frank Zappa avant même qu'il ait sorti son premier album. En effet, comme dans tous les autres Mondo Movies américains de cette époque, la musique y est un élément majeur, assuré ici par des formations qui allaient par la suite devenir cultes comme Davie Allan & the Arrow ou The Mugwumps et d'autres noms comme The Raphaels. Il faut savoir que les personnalités choisies pour figurer dans le film ont-elles mêmes par moment assuré les chants et les parties musicales des épisodes les concernant.

Dans sa sélection, Robert Carl Cohen avait appliqué trois critères qu'il a suivi à la lettre : que ce soit quelque chose qui représente totalement Hollywood, son rêve et ses illusion, que la personne choisie soit inhabituelle et fantasque, et qu'elle soit dans le rêve Hollywodien. Il a donc retenu en vrac et entre autres Gypsy Boots, un écolo déjanté, Lewis Beach marvin III, un millionnaire qui vit avec un singe et so nchien, margaretta Ramsey, une actrice, Vito, un musicien hippy excentrique, Mr & Mrs White, un couple aisé, Dale E. Davis, un surfeur, Valérie Porter, une ancienne actrice de films de série B, Estella Scott, une femme de ménage, Sheryl Carson, une esthéticienne, Carol Cole, la fille de Nat King Cole, Richard Alpert, un psychologue, Helen White, une star du cinéma muet, ainsi que des sportifs, go-go danseuses, travestis ou accros aux amphétamines.

Comme d'autres films de l'époque, tel Medium Cool par exemple, il faut recadrer cette œuvre dans son contexte et dans les bouleversements qui déchiraient les États-Unis à ce moment-là : les manifestations anti-Vietnam, le mouvement des droits civiques, l’émergence très forte de la contre-culture avant qu'elle ne montre sa face la plus sombre. Il est d'ailleurs à noter que Bobby Beausoleil, un des personnages du film, a travaillé pour Kenneth Anger avant de commettre des crimes avec les disciples de Charles Manson et d'être incarcéré à vie. On y retrouve aussi un coiffeur, Jay Sebring, qui fut assassiné par la bande de Manson.
Mais ceux qui attendent de voir un Mondo dans la lignée italienne, avec des scènes terribles, seront décontenancés car il ne demeure ici qu'un désir de faire un cinéma libre, sans tabous, sans interdit. Du coup, les censeurs critiqueront le fait que, selon eux, le film fait l'apologie de la drogue mais, comme Cohen le dit lui-même, ce n'est pas sa faute si "à n'importe quel endroit où je mettais la caméra, la culture de la drogue était présente". Des éléments très Mondo demeurent néanmoins : en pur héritier du plan choc à la Jacopetti, Cohen passe de culturiste leveurs de poids à une femme qui coupe une tranche de viande. S'ajoutent des scènes de foules, des matches de foot ressemblant à des grandes messes nazies, des cracheurs de feu et un goût pour les freaks, une visite d'un musée du sexe, une évocation des sexualités taboues, etc. Le montage, quant à lui se délecte dans le gros plan et les effets psychédéliques.

En 1968, le film fut invité pour ouvrir le Festival du film d'Avignon, le ministère de l'information interdira instamment le film pour des raisons qui semblent bien absurdes aujourd'hui : "Apologie d'un certain nombre de perversités, parmi lesquelles les drogues et homosexualité... Un danger pour la santé mentale du public par son agression visuelle et la psychologie de son montage". Trois années plus tard, en 1971, le ministère français de la Culture enlèvera l'interdiction " en raison des changements profonds" apportés au film. Rien ne fut changé mais Mondo Hollywood gardera une réputation sulfureuse, notamment en Californie où il fut interdit deux fois et accusé de "pornographie".


Sébastien Gayraud et Maxime Lachaud in Mondo Movies et films cannibales, Reflets dans un oeil mort (2010) page 67 à 70.

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Mondo Movies et les films de cannibales. Reflets dans œil mort de Sébastien Gayraud et Maxime la chaud. Mondo movies et films de cannibales. Deux genres qui n'en sont qu'un, à mi chemin entre le documentaire et le film d'horreur. De Mondo cane (1962) à Cannibal holocaust (1980), plus de vingt ans d'images-choc, de polémiques, de scandales. Un cinéma du XXe siècle, inconnu, mystérieux. Ici, les explorateurs se perdent dans la jungle, fusils et caméras aux poings. Ici, le monde entier est un spectacle et la vie et la mort sont authentiques. Authentiques, vraiment ? Où se termine la réalité et où commence la fiction? De l'Italie à la France, en passant par les États-Unis, une fascinante cinématographie parallèle, véritable panorama de l'étrange. De L'Amérique insolite jusqu'à La France interdite, de Mondo Hollywood jusqu'à Face à la mort, un voyage aux frontières de l'extrême. Reviendrez-vous de ces continents perdus ? - 368 pages, 30 euros. Disponible auprès de THE END (à commander à theendstore@gmai(POINT)com

John Carpenter, le retour

Plus de 10 après son dernier long métrage (Ghost of Mars, 2001), John Carpenter fait son grand retour, non pas en salle mais directement en dvd/blu-ray avec The Ward, l’hôpital de la terreur.


En 1966, dans l’Oregon, Kristen est arrêtée par la police après avoir mis le feu à une ferme. Murée dans un état de stupeur, le corps couvert d’ecchymoses et incapable d’avoir le moindre souvenir de ce qu’il s’est passé, Kristen est enfermée dans un hôpital psychiatrique pour jeunes filles. Au sein de l’institution, les autres détenues : Emily, Sarah, Zoey et Iris, vivent toutes dans la terreur d’un fantôme qui aurait été vu la nuit dans les couloirs. Kristen, qui est bien décidée à s’échapper, n’y prête aucune attention mais va bientôt comprendre que la créature qui hante l’institution détient peut-être la clé pour comprendre son passé…

Bonus :
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> Commentaires audio de John Carpenter et Jared Harris (VOST)
> Les coulisses du film



C'est probablement du aux mauvais échos lors de festivals qui a freiner les distributeurs français pour une exploitation salle. Heureusement les fanatiques de Big John ont pu découvrir le film durant la première édition du PIFFF (Paris International Fantastic Film Festival). THE END était présent mais à délibérément fait l'impasse sur le film pour ne pas définitivement enterré le réalisateur de Prince des Ténèbres et de Assaut sur le central 13, aujourd'hui nous regrettons...
Édité par Metropolitan Filmexport, le label a la riche idée de ressortir le même mois (février 2012) le premier film de John Carpenter, le cultisme Assaut.


Dans un commissariat isolé, où téléphone et électricité ont été coupés, un groupe de policiers se retrouve sous l’assaut d’un gang de rue de Los Angeles. Afin de s’en sortir, Ethan Bishop, lieutenant de police, doit demander l’aide des prisonniers détenus au poste.

Bonus :
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> Commentaire audio de John Carpenter
> L'histoire du film (16 mins)
> Piste séparée avec la bande originale
> 2 spots radio
> Bande-annonce



Le bonus THE END, quelques extraits du livre John Carpenter par John Carpenter de Gilles Boulenger jamais sorti en librairie mais jadis disponible dans l'édition collector limitée de Ghost of Mars.

Comment avez-vous rencontré Joseph Kaufman et J. Stein Kaplan, les producteurs du film ?
J. Stein Kaplan était un ami de l'USC, et il avait rencontré Joseph Kaufman lors d'un séjour à Philadelphie. je devais réaliser eyes avec le duo Kaplan/Kaufman comme producteurs, mais Jon peter et la Colombia ont voulu acheter le projet. J'ai donc écrit Assaut pour le tandem Kaplan/Kaufman en remplacement de Eyes.

Sont-ils intervenus durant le tournage ? Ou aviez-vous une totale liberté ?
J'ai eu une liberté totale. Mes seules limites étaient d'ordre budgétaire.

Comment s'est fait le distribution des rôles ? Sur quels critères ?
Darwin Joston était un ami. Un voisin, en fait. C'était l'époque où je vivais sur les collines de Hollywood, près de l'endroit où a été tourné l'Invasion des profanateurs de sépultures [de Don Siegel, 1956]. J'avais vu Austin Stocker dans Abby et Sheba Baby, deux films de blaxploitation. Nancy Loomis était la petite amie de Tommy Lee Wallace,, mon producteur exécutif. henry Brandon [qui jouait Scar dans La Prisonnière du désert, Ndr] était assez âgé à l'époque et était plus qu'heureux de se retrouver dans Assaut. J'ai choisi Laurie Zimmer et tout le reste de la distribution après des essais libres. A mes débuts, je choisissais les comédiens sur des critères simples : leur aptitude à la comédie et leur tempérament bon enfant. On ne payait pas beaucoup, alors il fallait que tout se passe pour le mieux.

La manière dont le film est structuré reste assez unique dans votre œuvre. Vous installez quatre actions différentes, puis vous les reliez entre elles.
Je voulais montrer le caractère inéluctable d'événements dus au hasard qui, en s’entremêlant, finissent par provoquer une situation qui n'aurait jamais eu lieu dans d'autres circonstances. C'était le biais que j'avais trouvé pour surmonter le caractère invraisemblable de l'idée du siège. Le film terminé, je me rappelle avoir lu un article sur un commissariat, Fort Apache, à New York, qui subissait les attaques constantes des habitants du quartier. J'ai alors réalisé que l'idée de base de Assaut n'était pas aussi ridicule et mélodramatique que j'avais pu l'imaginer.

Autre ouvrage consacré à John Carpenter paru lui en librairie mais aujourd'hui épuisé, Mythes et Masques : les fantômes de John Carpenter de Luc Lagier et Jean-Baptiste Thoret retrace film après film la carrière de ce grand cinéaste du fantastique. Extrait :

"Au milieu des années soixante-dix, la tendance du cinéma américain est l'atomisation des formes de narration classiques. dans les films de Tobe Hooper, Georges Romero ou encore Wes Craven, la caméra se déchaine et tente de restituer une réalité déconstruite par le cauchemar du Vietnam. Si Dark Star (1974) ne déroge pas à cette veine chaotique et désabusée, Assaut (que l'on peut considérer comme le premier "vrai" film de Carpenter) travaille une forme qui, en apparence seulement, confine à l'ultra classicisme. Mais derrière sa facture faussement désuète de série B révérencieuse, Assaut dissimule en ébullition, subtilement masqué par la rigueur des cadrages (l'utilisation du cinémascope renforce cette sensation d'ordre) et celle du récit, très respectueux des règles de la tragédie classique (unité de lieu, de temps et d'action). Dans le dispositif fantastique du film, ce travail sur la surface est essentiel : il a pour fonction de charger au maximum la vraisemblance de l'histoire et de forger une réalité opaque. Lorsqu'il se déclenchera, le siège apparaitra ainsi littéralement incroyable aux yeux des spectateurs, comme à ceux des protagonistes. "Le Fantastique ne se conçoit que par rapport à une norme" écrit Charles Grivel, et l'effet fantastique produit sera d'autant plus efficace que cette norme aura d'abord paru inébranlable. L'originalité d'Assaut réside donc dans sa double capacité à construire une surface ordonné et sûre, et de procurer dans le même temps, une sourde impression de chaos"

Melville, l'homme au Stetson

Alors que la sortie événement en dvd / bluray collector du film Le Samouraï (1967) fait des remous sur internet (dvdclassik) et dans la presse (Cahiers du Cinéma) et ce, en partie dû à une qualité d'image quelque peu approximative en comparaison au Criterion, voire au René Chateau, l'éditeur Sonatine annonce la sortie d'un ouvrage consacré au maitre du polar, Jean-Pierre Melville.


Présentation de l'éditeur :
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Été comme hiver, Jean-Pierre Melville arborait invariablement un Stetson et des Ray-Ban. Le cinéaste du Samouraï et du Cercle rouge n’a jamais cessé d’entretenir sa légende.

Mais qui était vraiment ce styliste hors pair dont les treize longs-métrages continuent d’influencer des cinéastes aussi divers que Quentin Tarantino ou John Woo ? Un visionnaire qui a préfiguré la nouvelle vague en s’affranchissant des règles traditionnelles et en créant ses propres studios ? Un réalisateur tellement maniaque qu’il n’hésitait pas à se brouiller avec ses stars ? Un homme à jamais marqué par son passage dans la Résistance ?

À travers une enquête qui l’a conduit à rencontrer une quarantaine de proches et à découvrir des documents jusque-là classés « Confidentiel » dans les archives de la France combattante, Bertrand Tessier reconstitue le parcours d’un homme aussi complexe que génial tout en faisant revivre une époque : celle du grand polar à la française.


L'auteur
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Bertrand Tessier est journaliste, auteur et réalisateur. Il a signé des documentaires sur Romy Schneider et Patrick Dewaere et publié des biographies de Jean-Paul Belmondo, Alain Delon et Romy Schneider.

source : Sonatine

A noter que l'ouvrage Riffs pour Melville que nous évoquions ici est toujours disponible auprès de nous.

Jean Rouch : 3 nouveaux dvd

L’œuvre de Jean Rouch (1917-2004) parait gargantuesque et en perpétuelle redécouverte. Le cinéphile devra attendre très longtemps avant de pouvoir revoir certains films du cinéaste ethnographe tant la restauration prend du temps face à une filmographie considérable. Les Éditions Montparnasse ont déjà proposé à travers diverses sorties un large spectre de son travail, notamment celui consacré à l'Afrique mais ces deux nouveaux titres prouvent que d'autres long-métrages documentaires sont encore à redécouvrir.

Chroniques d'un été / Edgar Morin et Jean Rouch (1960)

Paris 1960. Alors que la guerre fait rage en Algérie et que le Congo lutte pour son indépendance, Edgar Marin, sociologue, et Jean Rouch vont enquêter sur la vie quotidienne de jeunes parisiens pour tenter de comprendre leur conception du bonheur…

La version proposé ici est de 90 minutes. A l'origine le bout à bout fait par Morin et Rouch était de 4 heures, une durée déjà réduite puisque se sont pas moins de 20 heures qui ont été tourné. Dans un article des Cahiers du Cinéma, il a été évoqué que ces 20 heures soient proposés sous forme d'épisodes pour mieux rendre l'aspect prise de vue du quotidien parisien. Malheureusement cela ne semble plus d'actualité...

Passons au second titre à sortir au mois de mars 2012 qui fait partie des derniers travaux de Jean Rouch.

Madame l'eau (1993)

A la recherche de solutions pour lutter contre la sécheresse, Lam, Damouré et Tallou partent en Hollande, le pays de l’eau et des moulins. Ils ramènent dans leurs bagages un ingénieur néerlandais et le moulin démontable dont il est l’inventeur.

Nous ne savons que très peu de choses sur ce film qui fait partie des très nombreuses "ethnofiction" du cinéaste. Le film a reçu le Prix de la Paix à Berlin en 1993. A noter que le tournage de Madame l'eau a fait l'objet d'un autre film Rouch's gang (1998) signé Steef Meyknecht, Dirk Nijland et Joost Verhey.

Finissons par un documentaire de 52 minutes de Philippe Costantini sur l'hommage de Jean Rouch à Germaine Dieterlen, ethnologue de renom disparu en 1999, qui eut droit à un enterrement Dogon au Mali. Le film fait également figure de testament puisque Jean Rouch restera définitivement au Mali où il s’éteindra quelques semaines plus tard, le 18 février 2004.


Présentation de l'éditeur :
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En décembre 2003, Jean Rouch se rend au Mali, en pays dogon. Depuis la mort de Germaine Dieterlen avec qui il tourna les cérémonies du Sigui et plusieurs films sur les rituels funéraires, Jean Rouch souhaitait ardemment que des funérailles traditionnelles lui soient célébrées comme ce fut le cas pour Marcel Griaule (chef de la mission Dakar - Djibouti en 1931) qui révéla le peuple Dogon. Jean Rouch, fils spirituel de Marcel Griaule, retrouve ainsi à Sangha les fils des informateurs avec qui Germaine et lui travaillèrent tout au long de ces années de tournage et de recherche. Il évoque avec eux le souvenir de cette relation singulière établie par Marcel Griaule et poursuivie soixante ans durant par celle que les Dogons appellent “Madame l'Éternelle”. Fidèles au souhait de Jean Rouch, disparu brutalement avant la cérémonie prévue, les Dogons rendent leur hommage en inhumant un mannequin dans une grotte funéraire et élèvent ainsi cette grande dame au rang d'ancêtre.

“Ce devait être la cérémonie funéraire pour Germaine Dieterlen, ce fut aussi un peu celle de Jean Rouch (...). C'est ce moment étrange de passation des savoirs, cet adieu aux Dogons et à lui-même, que le film a saisi (...). Un bel hommage du village à celle qui était pour eux Yassiguiné, la soeur des masques. Pas seulement une ethnologue, une initiée donc, tout comme Rouch. Après leur départ, les Dogons n'ont pas seulement la mémoire de leurs dialogues avec Germaine, de leurs tournages avec Jean Rouch, ils ont aussi les photos de Germaine et de Jean. Et les films.” (Libération).

Les Introuvables : Lang, De Toth, LeRoy

Voilà bientôt 10 ans que Wild Side à travers sa collection "Les Introuvables" comble le cinéphile comme l'amoureux d'un cinéma tombé dans l'oubli. Avant l'arrivée du dvd et de Wild Side, le seul moyen de (re)voir certains films étaient d'espérer un passage télévisé (cable, satellite ou hertzien) ou lors d'un festival ou d'une rétrospective. Autant dire une probabilité plus que hasardeuse. Aujourd'hui avec internet et le raccourcissement des distances, quantités de long-métrages sont aujourd’hui accessibles. Espérons que cela continue encore et toujours, de quelque manières que se soient...

Les trois prochains titres sont déjà connus depuis le début du mois de décembre via dvdclassik et 1kult mais nous vous proposons le visuel de ces trois films américains signés Fritz Lang (dont une rétrospective est en cours à la Cinémathèque de Paris), André De Toth et Mervyn LeRoy. Tous les trois ont déjà eu l'honneur de précédentes éditions, ce qui marque une certaine fidélité de la part de Wild Side envers ces cinéastes.

Désirs humains [Human Desires](1954)

Carl Buckley (Broderick Crawford) tue l’amant de sa femme Vicki (Gloria Grahame). Témoin de la scène, elle avoue le meurtre à Jeff Warren (Glenn Ford), un collègue de Carl. Pour ne pas compromettre Vicky dont il s‘est épris, Jeff garde le silence. Les amants décident alors de tuer le mari…
Inédit en DVD, ce drame social magistral est un des grands classiques du maître Fritz Lang. Inspiré de La Bête humaine de Zola, ce bijou de réalisation met en scène Glenn Ford (Gilda, La Vallée de la poudre), Gloria Grahame (Feux croisés, Les Ensorcelées) et Broderick Crawford (Les Fous du roi, Les Gens de la nuit).

Bonus : La loi des Désirs, entretien avec Bernard Eisenschitz (13mn)

La Valse dans l'ombre (Édition Collector [Waterloo Bridge] (1940)

Londres, 1917. Myra tombe amoureuse de Roy, un officier, sur le pont de Waterloo pendant un raid aérien. Plus tard, l’armée annoncera qu’il est tombé sous le feu de l’ennemi. Le cœur brisé, Myra sombre dans la prostitution. Mais parfois l’histoire se répète…
Merveille de réalisation à la sublime photographie, LA VALSE DANS L'OMBRE met en scène les stars Vivien Leigh (Autant en emporte le vent, Un tramway nommé désir et Robert Taylor (Ivanhoé, Libre comme le vent) dans une inoubliable histoire d'amour. Un trésor enfin édité, accompagné de la 1ère version du film, réalisée par James Whale (Frankenstein, la Fiancée de Frankenstein) en 1931.

Bonus : Waterloo Bridge : un pont entre deux rêves, entretien avec Olivier-René VEILLON (13mn) + Waterloo Bridge (1931) - 78 minutes - avec : Mae Clarke, Douglass, Montgomery, Doris Lloyd, Frederick Kerr, Enid Bennett, Bette Davis.

Femme de feu [Ramrod] (1947)

Connie Dickason refuse d’obéir à son père Ben qui souhaite la marier à Frank Ivey, un rancher très puissant, autoritaire et irascible. Pour tenir tête à ce dernier, elle engage Dave Nash…
Œuvre rare du grand André DeToth, FEMME DE FEU (Ramrod) est une pépite magistralement réalisée. Le film rassemble Joel McCrea (Buffalo Bill, Coups de feu dans la sierra) et la star Véronica Lake (pour son unique western) dans un rôle savoureux de lady manipulatrice et indépendante.

Bonus : Western noir pour femme de feu : entretien avec Bertrand Tavernier (26mn)

source : Wild Side

Black Power Revolution : cinéma & dvd

L'un des privilèges de vivre à Paris est de ne rater aucun film, ou presque. Sorti le 16 novembre 2011, le film documentaire suédois Black Power Mixtape 1967-1975 est toujours à l'affiche de quatre salles parisiennes. Croisons les doigts pour que le film fasse le tour de France et qu'une salle niçoise est la bonne idée de projeter ce documentaire retraçant l'évolution de la condition des noirs aux USA durant les années 60 et 70 et de leur combat.


Extraits du dossier de presse :
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The Black Power Mixtape est un documentaire d’archives axé sur la musique qui examine l’évolution du mouvement « Black Power » dans la communauté afro-américaine ainsi que sa diaspora entre 1967 et 1975. Combinant de surprenantes images inédites tournées en 16mm, reposant dans les caves de la télévision suédoise depuis 30 ans, avec des entretiens audio contemporains d’artistes, d’activistes, de musiciens et d’érudits afro-américains majeurs, le film observe les gens, leur culture et leur style au sein d’une société en changement. Utilisant un format novateur qui colle au format populaire des années 1970, The Black Power Mixtape est un voyage cinématographique et musical au sein des ghettos américains.
A la fin des années 1960 et au début des années 1970, l’intérêt des suédois pour le mouvement contre la guerre et pour celui des droits civiques aux Etats-Unis a atteint un sommet. En combinant engagement et naïveté, les réalisateurs suédois ont traversé l’Atlantique afin d’explorer le mouvement « Black Power », qui était tantôt ignoré, tantôt dépeint par les médias américains comme un mouvement naissant, terroriste et violent. Malgré les obstacles auxquels ils ont été confrontés de la part des conservateurs blancs américains comme des membres de mouvements radicaux, les réalisateurs suédois n’ont pas interrompu leurs investigations et ont formé au bout du compte des liens avec des figures-clés du mouvement « Black Power », basés sur leur objectif commun d’obtenir l’égalité en droits pour tous. [...]
Les entretiens filmés incluent à la fois des grandes figures telles que Stokely Carmichael, Eldridge Cleaver, Bobby Seale et Angela Davis (au temps de son incarcération), ainsi que des extraits du téléfilm de Lars Ulvestam : Harlem : Voices, Faces. (Quand ce film fut diffusé en Suède, l’ambassadeur américain basé dans le pays a demandé et obtenu un temps de parole à la télévision suédoise pour mettre en lumière les « nombreux défauts » du film).

Une rumeur circula pendant des années parmi les réalisateurs comme quoi la Suède avait plus de matériel d’archives sur les Black Panthers que les Etats-Unis. Il y a 2 ans, je travaillais sur un film parlant de Philly Soul et j’explorais les archives de la Swedish Television quand j’ai compris que cette rumeur était fondée. Peut-être pas entièrement, mais les archives sur le Mouvement Black Power étaient incroyablement riches. J’ai tout de suite su que j’avais mis la main sur quelque chose de rare. A partir du moment où nous avons vu le contenu d’archives, nous avons su immédiatement que nous ferions The Black Power Mixtape 1967-1975, d’une manière ou d’une autre. Nous n’avons pas attendu l’approbation de qui que ce soit ; nous avons commencé à faire ce en quoi nous croyions, et avons trouvé les fonds nécessaires au cours de notre cheminement. J’ai également considéré cet acte comme mon devoir de faire en sorte que ces fantastiques images sortent de la cave et soient rendues accessibles au public.
Göran Hugo Olsson, réalisateur

Déjà disponible en zone 1 ou en zone 2 uk (sans sous titres à l'exception des passages en suédois qui sont sous-titrés en anglais), le film n'est pas encore annoncé en dvd en France. Mais le documentaire est soutenu par Arte, ayant déjà sorti divers films dont ceux de William Klein consacré au FESTIVAL PANAFRICAIN D'ALGER et à ELDRIDGE CLEAVER BLACK PANTHER (dans un coffret 2 dvd disponible auprès de THE END) ainsi qu'un autre double dvd, THE MURDER OF FRED HAMPTON / AMERICAN REVOLUTION 2. Ce documentaire viendrait completer leur offre des plus belles manières.

En attendant une éventuelle sorti en dvd, on pourra toujours patienter en se procurant le documentaire de John Evans chez BQHL. Datant de 1998, ce film est une interview de Huey P. Newton (1942-1989), co-fondateur et leader du parti Black Panther, durant son emprisonnement dans les années 70.

OAKLAND, 1966 : fatigué de subir le harcèlement de la police locale depuis des années, un groupe de jeunes activistes met sur pied des patrouilles armées, chargées de mettre fin à la brutalité policière. C'est ainsi que nait le Black Panther Party pour l'Autodéfense. Abandonnant la philosophie de Martin Luther King quant à la résistance non-violente, les Panthers prônent une politique plus militante, notamment l'autodétermination et le séparatisme pour leur peuple. Huey P. Newton est le cofondateur du Black Panther Party pour l'Autodéfense, une organisation considérée par J. Edgar Hoover, directeur du FBI, comme “la plus grande menace à la sécurité intérieure des États-Unis”. Il passe quatre ans en prison pour homicide, avant que sa condamnation ne soit annulée en 1971. Ce document fort consiste en une interview exclusive de Newton pendant son incarcération, réalisée par le cinéaste John Evans. Newton expose ses buts en tant que révolutionnaire : l'autodétermination pour les Afro-Américains, le plein emploi, un logement décent pour les pauvres et les gens privés du droit de vote, la fin de la brutalité policière et le retrait des troupes américaines du Viêtnam.

Cinémathèque de Nice | De Palma & Pagnol

Si le début d'année 2011 voit la fin du cycle Pierre Etaix et David Leane, la semaine prochaine la cinémathèque de Nice commence deux hommages à Brian De Palma et Marcel Pagnol, une confrontation pour le moins... exotique.

A THE END, nous avons toujours défendu l'idée de "mixité" entre les cinéastes et les films et laissez les questions de hiérarchie au cinéphile pour apprécier un Rollin comme un Godard, un Dominic Sena comme un Lautner. "Récemment" dans l'industrie musicale et vidéo, le "mash-up", mélange de son et d'image en provenance de différente source trouve un certain succès. Un festival, MashUp Film Festival, a même eu lieu au Forum des images à Paris en juin dernier. Si il n'est pas question ici de cette "discipline", la proximité et la possibilité de voir un Pagnol puis un De Palma nous donne le sourire, un sourire plein de perversité cinématographique. Pour le plaisir des yeux, voici quelques affiches de films présentés durant le mois :

FURY [The Fury] (1978)

Un ancien agent de la CIA recherche son fils disparu. Il le retrouve bientôt, prisonnier d'une agence secrète du gouvernement américain qui kidnappe les enfants dotés de pouvoirs surnaturels pour en faire des tueurs…

> mardi 24 janvier à 20h00
> jeudi 26 janvier à 16h30

CARRIE AU BAL DU DIABLE [Carrie] (1976)

Carrie, tyrannisée par sa mère et tête de Turc de ses camarades, a une adolescence difficile. Lorsqu'une de ses camarades la prend en pitié et veut l'aider, une autre monte un complot spectaculaire contre la jeune fille qui doit la ridiculiser…

> mardi 10 janvier à 18h15
> vendredi 13 janvier à 21h15

BLOW OUT (1981)

Jack, ingénieur du son, enregistre accidentellement la preuve d'une conspiration qui a conduit à un meurtre maquillé en accident. Voulant faire éclater la vérité, sa vie est menacé par les tueurs…

> mercredi 11 janvier à 19h30
> samedi 14 janvier à 14h00

PULSION [Dressed to Kill] (1980)

Une jeune femme perturbée consulte un psychiatre. Après ce rendez vous, elle visite un musée et rencontre un homme avec qui elle passe la nuit. Le lendemain elle est assassinée. Il y a un témoin…

> mardi 24 janvier 2012 à 14h00
> vendredi 27 janvier 2012 à 21h30

Tous les films du cycle Brian De Palma
OBSESSION | LE BÛCHER DES VANITÉS | MISSION : IMPOSSIBLE | MISSION TO MARS | FEMME FATALE | LE DAHLIA NOIR | REDACTED | L’ESPRIT DE CAÏN L'IMPASSE | SNAKE EYES

Si nous sommes heureux de pouvoir (re)découvrir sur grand écran la quasi intégralité de l’œuvre cinématographique de Brian De Palma, la cinémathèque n'a malheureusement pas fait "l'effort" de proposer des long-métrages moins "(re)connus" comme Greetings, Hi mom ou encore sa période années 60 comme le récent Murder à la Mod disponible en dvd (et auprès de THE END). Tous sont disponibles sur support numérique et la cinémathèque fait partie des institutions qui n'ont aucun problème pour diffuser ce matériel (à notre grand regret, surtout sans aucune mention).

LA cinémathèque proposera également toute une série de films récents dont :
VOUS ALLEZ RENCONTRER UN BEL ET SOMBRE INCONNU | THE GHOST WRITER | POETRY | APPALOOSA | NORTEADO | SOMEWHERE | LE COMPLEXE DU CASTOR...

Retrouvez tous les horaires et tous les films sur cinematheque-nice.com

Derek Jarman sur grand écran

Tandis que sa filmographie apparait au compte goutte en dvd - du moins en France seulement trois films disponibles* sur le support - le grand écran (et l'import) reste encore le meilleur moyen pour découvrir ou revoir certains long-métrages rares de Derek Jarman (1942-1994). Le cinéphile aura en ce début d'année deux occasions pour voir dans les salles obscures, deux films emblématiques de sa carrière, Jubilee (1978) au Forum des images (Paris) dans le cadre d'un cycle "London is swinging" et Edward II (1991) au Nouveau Théâtre de la cité (Nice).



L’ange Ariel prédit à la reine Elizabeth l’avenir de l’Angleterre, où régnerait l’anarchie. “Jubilee est un portrait réaliste et haut en couleurs de ce qu’a pu être l’éclosion du mouvement punk à Londres, plein de violence, de passion, de sexe, de drogue et de mort.” (Alain Pacadis, Libération)


Analyse de Gérard Courant
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On se demande bien de quelle manière ce film va être reçu par le public. Tourné en 1977 au moment où le mouvement punk était en pleine effervescence, il a, trois ans plus tard, un petit goût de rétro qui, à coup sûr, n’est pas pour le désavantager. Et pourtant, c’est un film qui ne triche jamais avec lui-même : donner un aperçu parcellaire et jamais global d’un fait de société qui secoua les bases tranquilles de la société britannique. Tout y est : violence, sexe, destruction, vermine, décadence, bref, l’apocalypse. Derek Jarman épouse ces idées et cette réalité en filmant joyeusement et avidement la crasse, un Londres rempli de merde, un Londres ignoré des touristes et envahi par les punks, le tout en un rituel endiablé qui fait plaisir à voir.

Derek Jarman se sent à l’aise dans cet espace. Il n’a ni l’oeil de l’ethnologue, ni celui du sociologue venant enquêter sur un groupe marginal dont il ne pourrait donner qu’une représentation obligatoirement floue et diffuse. Rien de tout cela : il sait sur quel terrain il se trouve et filme en conséquence sans se soucier le moins du monde d’une quelconque grammaire cinématographique. Pour filmer les partisans de la destruction, on ne pouvait pas demander mieux ! Il invente à mesure qu’il filme. Ce n’est jamais génial, mais jamais ennuyeux et toujours emballant.

L’histoire est cucul et à l’eau de chardon : en 1578, l’alchimiste John Dee propose à la Reine Elizabeth de faire un voyage dans l’avenir. Elle accepte et découvre un Londres sans couronne, sans loi, sans ordre, aux mains et aux bottes de cuir de hors-la-loi anarchistes. Comment est-ce possible, se dit-elle ? Vous imaginez sa surprise ! C’est drôle, d’autant que, à aucun moment, les personnages de ce film ne se prennent au sérieux. Je ne sais pas comment Derek Jarman est parvenu à imprimer si fortement cette impression, mais ça marche ! On peut imaginer que chacun des interprètes a pu donner beaucoup de lui-même et en retour Jarman a dû les laisser très libres.

À qui s’adresse un tel film ? Assurément pas aux punks puisqu’ils n’existent presque plus ! À tout un chacun, sans aucun doute, car il se propose, sans ambages ni cérémonie, de mettre à vue et à nu un monde effondré, en totale décrépitude où la seule loi qui demeure est celle du plus fort. Bref, c’est un monde pourrissant qui tire à sa fin. Et si ce monde était le nôtre ?

Derek Jarman procède de la même manière que le Godard de Alphaville ou que le Kubrick de Orange mécanique. Ses extérieurs très réels de la périphérie londonienne deviennent un autre monde. Jarman situe son futurisme dans le monde d’aujourd’hui avec des flics presque identiques à ceux de sa majesté, la Reine d’Angleterre. Épurant le genre romanesque avec l’énergie d’une réalité quotidienne, Jarman se trouve confronté avec ce que Annette Michelson, dans son étude sur Alphaville, désigne par la notion d’immanence : immanence du futur dans le présent, de l’horrible dans le quotidien et du fantastique dans le réel.

Et pourtant, il y a une contradiction essentielle entre ce fait apocalyptique qui ne laisse guère d’espoir (le No future craché par les punks) et les personnages de ce film qui, tel Lemy Caution débarquant à Alphaville, prennent possession d’un espace poisseux. Bob, la réincarnation de la Reine, Amyle Nitrite, la chanteuse punk, Mad, la pyromane et Crabs, une « nympho » de première, quatre femmes, maîtresses des lieux, quatre corps qui ne se laissent pas marcher dessus et qui dépensent une telle énergie qu’ils feraient frémir les habitants bien tranquilles de Farenheit 451. Elles investissent l’espace de la plus simple des manières : en fonçant droit devant elles, sans chercher le moins du monde à opérer des détours quand la géographie et la configuration des lieux leur conseilleraient de le faire. Bien entendu, cela ne va pas sans heurts, témoin cette séquence orgiaque et très drôle dans une boîte où s’affrontent hippies, mods et punks, trois générations de marginaux que l’alcool, la drogue et le sexe parviendront à réconcilier. Un joli carnage que Derek Jarman filme avec la dose de délire et d’humour qui scandaliserait la reine Elizabeth en personne si elle avait le malheur de voir ce film.
Gérard Courant in Cinema 80, n°255 - mars 1980

> Jeudi 5 janvier à 16h30
> dimanche 15 janvier à 21h00

Le film Jubilee est disponible auprès de THE END en deux éditions dvd : zone 1 (Criterion) et zone 2 (import UK), attention pas de sous-titres.




Nouvellement couronné, Édouard II rappelle son fidèle ami et amant Piers Gaveston de l’exil. Follement épris de ce dernier, Édouard le couvre de cadeaux et de titres honorifiques, suscitant la jalousie de la cour. Avec l’appui du roi, Gaveston fait torturer et enfermer l’évèque de Winchester, responsable de sa déportation, à la Tour de Londres. Outragé par cet acte, la cour s’organise autour de Mortimer, le chef des armées, et de la reine Isabelle, souveraine délaissée, pour exclure Gaveston. Sous la contrainte, Édouard doit bannir son amant…

Réécriture vandale de la pièce de Christopher Marlowe, Edward II est une oeuvre libre et baroque qui mêle passion, trahison et violence en faisant fi de toute règle. Contestataire et provocateur, Jarman mêle la langue de Marlowe, l’un des plus illustres contemporains de Shakespeare, aux formes et aux emblèmes postmodernes des années 90. Puisant aussi bien dans la scénographie moderne (les espaces vidés du décor qui évoque le carton-pâte du Macbeth d’Orson Welles), que dans l’iconographie gay (le goût pour les uniformes comme revendication identitaire) ou dans l’esthétique pop (l’icône Annie Lennox y fait une apparition remarquée), Edward II mélange les genres sans pour autant renier son origine classique. Artiste protéiforme, figure clé du cinéma expérimental, Derek Jarman fait partie de ces cinéastes qui, avec Ken Russell et Kenneth Anger, ont construit leur cinéma autour du saccage des conventions. Oeuvre d’un auteur culte mort du sida en 1994, Edward II est un condensé magnifique de rage et de poésie.

Présentation de Derek Jarman
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Michael Derek Elworthy Jarman nait le 31 janvier 1942 à Northwood en Angleterre. Il étudie la peinture dès les années soixante à la Slade School of Fine Arts, ce qui lui permet, à la sortie de l’école, de décrocher ses premiers contrats en tant que décorateur pour plusieurs opéras du Royal Ballet.
En 1970, il fait son entrée dans le monde du cinéma grâce à The Devils (Les Diables) de Ken Russell, pour lequel il est engagé pour faire les décors, ainsi que pour collaborer à la production. Se découvrant une passion pour le septième art, il prend part à la recherche de financement pour le film Savage MessiaMessie sauvage) de Ken Russell (1972), tout en s’essayant à la réalisation en tournant des courts métrages et des clips vidéos en caméra Super 8. En 1975, il coréalise avec Paul Humsfress le scandaleux Sebastiane, sur la vie du martyre Saint Sébastien, dans lequel il mêle religion et sexualité. Avec ce premier film, Jarman se forge déjà une réputation de cinéaste marginal -d’autant qu’il se déclare publiquement homosexuel- mais voit son œuvre devenir une œuvre culte pour la communauté homosexuelle, notamment grâce à sa manière d’exalter le corps masculin. En 1977, il signe, cette fois seul, un hommage à la culture punk de Londres, Jubilee (Jubilé), constitué d’épisodes successifs souvent violents et affichant une vision clairement antimonarchique.
Deux ans plus tard, Jarman porte à l’écran la pièce The Tempest de Shakespeare, tout en continuant en parallèle la réalisation de courts métrages. Durant les années quatre vingt, le cinéaste confirme à travers ses films un travail soutenant le mouvement homosexuel, alors en pleine affirmation. Il tourne ainsi The Angelic Conversation, film singulier qui reprend des sonnets de Shakespeare lus par Judi Dench, durant lesquels défilent des images photographiques d’un couple gay au ralenti. En 1986, il présente son film le plus populaire, Caravaggio, qui est à la fois une biographie anti-conventionnelle et une réflexion sur le célèbre artiste italien. Grâce à la conception visuelle du film qui s’apparente aux œuvres du peintre, Jarman reçoit un Ours d’argent lors de la Berlinale ainsi que le Prix spécial du jury au Festival International du film d’Istanbul. Fort de son succès, Jarman enchaine en dressant un sombre portrait de l’Angleterre intitulé The Last of England (1987), puis War Requiem (1988), sérieux réquisitoire contre la guerre. A cette même période, le cinéaste découvre sa séropositivité, et s’engage de manière plus active en faveur de la communauté gaie en parlant publiquement du sida.
Tout au long des années quatre vingt dix, Jarman prolonge son travail de soutien à la cause homosexuelle et de peinture provocante et impitoyable de la société britannique. On peut citer The Garden (1990) dans lequel il revisite la Passion du Christ à travers un couple d’homosexuels, ainsi qu'Edward II (1991), réécriture ravageuse de la pièce éponyme de Christopher Marlowe pour laquelle il fut récompensé du Teddy Award, le prix FIPRESCI à la Berlinale, et le Hitchcock d’or au Festival du Film britannique de Dinard. Très atteint par la maladie, il poursuit malgré tout son travail de relecture de l’Histoire avec Wittgenstein (1992), qui retrace la vie et la pensée du philosophe allemand à travers une succession de saynètes. Quelques mois avant son décès en 1994, il réalise Blue (1993), qui est à la fois un film testament et son autoportrait face au sida et à la mort, et enfin Glitterbug, un documentaire composé d’images inédites de sa vie et de ses tournages.
Proche du cinéma expérimental, Derek Jarman est un des cinéastes les plus extrêmes du cinéma britannique, et surtout un des seuls à être resté en dehors des circuits commerciaux. Véritable novateur, Jarman est une figure essentielle de l’histoire du cinéma anglais, notamment grâce son action en faveur de la communauté gay. Il a su utiliser l’Histoire comme métaphore de la société de l’époque, et faire passer des messages pacifistes à travers l’art et la culture en montrant les homosexuels de manière positive. N’ayant jamais abandonné la peinture, Jarman est également réputé pour son esthétique singulièrement poétique, et son attention aux décors qui participent véritablement à l’atmosphère du film.

> jeudi 12 janvier 2012 à 20h00 (copie 35mm)



source : Forum des images / Carlotta
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* Les trois films disponibles en dvd sont Caravaggio (1985) et Wittgenstein (1994) dans un double dvd et Edward II, tous deux sont disponibles auprès de THE END. Pour commander envoyer un mail à theendstore@gmail(POINT)com